Mokrane Maameri, un témoin des deux rives de la méditerranée

Sa colline, son enfance, ses voyages, ses expériences et sa langue natale, occupent l’œuvre du poète-écrivain algérien, Mokrane Maameri auteur de « L’écume des affects et autres Sonnets de résilience », le quatrième ouvrage qui vient de sortir aux éditions Belelan, nous dit tout

Pouvez-vous vous présenter ?

J’avoue que c’est un peu délicat de parler de soi car je ne me considère pas comme quelqu'un de suffisamment important, bien que j’aime l’écriture et la lecture et en particulier la littérature. Mais bon il faut se prêter au jeu.

Je suis né à Tala-Toulmouts un village situé à 10 km à l’est de Tizi-Ouzou. je suis arrivé à Paris à l’âge de vingt six ans juste après mon obtention de diplôme à Alger et libéré de mes obligations du service militaire. J’ai poursuivi mes études de droit des affaires privé à la Sorbonne et diplômé d’un Bac+5. Entre temps je continue à écrire sans jamais penser à publier. Mes études m’ont vraiment aidé pour comprendre la société française. Après mes études universitaire, je me suis retrouvé à travailler au service social comme conseiller à la jeunesse au conseil régional.

Quant à l’idée de publier, un jour j’ai montré une pile de manuscrit rangé dans un tiroir, à un ami professeur de lettre à la Sorbonne, il m’a tout de suite convaincu d’en envoyer un à un éditeur. Ainsi, mon premier livre, un recueil de poésie paru en 2009 et j’en suis à mon quatrième et je prépare en ce moment la sortie d’un cinquième.

Monsieur Mokrane Maameri, quel est votre parcours ?

Un parcours disant ordinaire comme celui de ma génération algérienne post-indépendance avec des hauts et des bas. Sauf que pour moi, il se trouve que j’ai forcé mon destin pour ne pas laisser le hasard m’orienter à sa guise.

Mais parfois quand il le fallait notamment dans les moments difficiles, dans les moments ou il faut prendre des décisions imminentes, je fais confiance à mon instinct et au feeling. Il s’avère dans ma vie, je suis toujours un forgeron qui dessine ou trace son chemin, un artisan. Artisan dans le sens où je sais que l'outil qui nous domine est de trouver le bonheur dans ce qu’on fait, l'envie de faire le travail qu’on aime sans jamais se plaindre ou se prendre au sérieux soi-même.

L'envie et la volonté d'apprendre de livre en livre que je lisais, de calepin en calepin que je noircissais régulièrement. Et puis une façon aussi de ne pas s'attribuer de titre, c'est aux gens qui me lisent ou qui voient mes actes de décider de mon parcours. Mais j’avoue que mon parcours est un peu électrique Trois diplôme complément opposés : Technologie en dessin industriel à Alger, deux autres, Droit et littérature en France en plus de l’écriture, je travaille dans le domaine social pour subvenir à mes besoins.

Quel est votre rapport à la lecture, la littérature ?

Ah, vous arrivez à un point ô combien sensible pour moi. Mais sans aller à vous la jouer grand intellectuel, la lecture c’est assez jouissive pour moi. Ça fait un peu plus de trente ans maintenant que je lis. Je suis un amoureux inconditionnel de la lecture, sans cela c’est comme si on m’ôte un poumon et je ne peux respirer, je m’étouffe.

Vous savez ! lire est indispensable. Je ne suis pas de même avis de certains écrivains ou poètes qui disent : « je n’ai pas besoin de lire pour écrire et créer ». Lire les autres c’est comme ouvrir votre fenêtre qui donne sur l’horizon et voir aussi le monde autrement.

Quant à la littérature, que dire ? Par amour et le respect que j’ai à cette discipline, je suis allé jusqu’à reprendre mes études en littérature pour comprendre l’univers théoriques de la littérature et j’écris en ce moment même une thèse que j’ai consacré à la littérature.

Comment écrivez-vous ?

Cette évolution à partir de l’éclosion du sujet et jusqu’à sa mise en écriture.
A Vrai dire, je n’ai pas de rituel d’écriture. J’écris à tout moment et parfois surtout quand l’inspiration me vient. Il suffit d’avoir un sujet ou une idée en tête et l’imagination débordante fait agréablement le reste.

Parfois, je fais des plans pour un genre précis comme l’essai, le roman ou la nouvelle, mais pas pour la poésie. J’écris partout, dans le transport commun, en marchant, au travail, même en étant avec les amis, la journée sur un calepin, le peaufiner et faire la saisie au soir à la profondeur de la nuit dans le silence absolu car à ce moment-là j’aime sentir et entendre le bruit et le murmure des fantômes que je crée le jour.

Vous savez, un écrivain ou poète qui écrit, il ne vit pas. Il passe son temps à convoquer des fantômes invisibles au jour et se mis à table avec eux la nuit. Il les ressent. Une fois le texte est saisi sur le support informatique. Je le relis, relis et relis d’abord en silence puis à haute voix car j’ai besoin de sentir son corps, sa musicalité. Puis, je le transmets à un comité restreint de lecteurs spécialisés dans le domaine littéraire dont chacun donne un avis

Qu'est-ce qui vous a inspiré pour écrire votre dernier livre ?

Honnêtement l’actualité ! En fait, on dit toujours que le poète est visionnaire. Ces textes ont été écrits durant mes voyages que ce soit en Algérie pour rendre visite à mes parents que ce soit dans presque toutes les grandes villes de l’Europe ou d’Amérique.

J’observe et je prends note c’était comme un peintre qui marche et là où il trouve un bon endroit, il pose son chevalet et commence à peindre. Ce recueil « L’écume des affects et autres sonnets de résilience » sont des fragments qui portaient la signature de chaque ville ou j’ai séjourné. J’ai vu et vécu des choses bonnes et d’autres pas bonnes. J’ai vu des misères, de la détresse des migrants sur les plages et frontières européennes. J'ai vu aussi la restriction des libertés et le racisme qui gagne du terrain en Amérique durant le mandat de Donald Trump. Comment voulez-vous ne pas écrire, ne pas dénoncer ces soi-disant démocraties occidentales qui ne cessent de donner des leçons aux autres.

Avez-vous une pratique d'écriture individuelle ?

Oui et non : je commence par la négation, car au départ l’écriture, pour moi en tout les cas, c’est une autre façon de se reconnecter à soi, en prenant le temps de s’accueillir, de laisser venir les mots se déposer et ainsi donner corps à mon intériorité.

En écrivant des bouts de vie, des bouts de soi, j’enrichissais inconsciemment mes expériences. Avec cette écriture individuelle à tout le temps et à tout espace, la vie devient plus vaste, plus approfondie, et dense. Je cherche des mots dans l’air pour dire ce que je vois, ce que je perçois, ce que je ressens. Des mots à moi, des mots qui disent la singularité de ma vision. Oui, car pour devenir auteur (poète ou écrivain) de ses propres mots, ça peut changer la vie. Il faut chasser le naturel pour apprendre un autre galop si je me permets de dire cela. A ce moment-là tout écrivain doit trouver son rythme et ces moments idéals.

Avez-vous déjà participé à un concours littéraires ?

Oui, je me souviens une fois c’était en 1991 dans les Hauts de Seine en France, soit une année de mon arrivé en France, j’avais écris un poème qui parle de l’asile et de l’immigration. Je l’ai envoyé à un concours de poésie qui s’est tenu à Clamart, sous l’assistance d’un professeur de français à la Sorbonne. A ma grande surprise je suis classé troisième et j’ai gagné un voyage deux personnes à Venise en Italie, un lot de livres et un abonnement d’une année gratuit à un magazine hebdomadaire littéraire. Et depuis, je n’ai jamais participé à d’autres concours faute de temps

Quelle est votre première grande découverte littéraire ? Et votre dernier coup de cœur ?

Je me souviens, j’avais à peine dix ans, mon grand père me parlait vaguement de Mouloud Mammeri mais sans précision. Quand je lui demande qui est ce ? Il me répond c’est un grand écrivain, c’est tout, rien de plus.

Puis sous mes insistances, un jour de fêtes de Yennayer, nouvel an berbère il m’a offert en cadeau le livre « La Colline Oublié » avec le nom de l’auteur, ça m’a mis dans tous les états. J’étais tellement content. C’était ma première grande découverte de la littérature, suivi quelques années plus tard de Mohammed Dib et Kateb Yacine. Puis arrive la grande littérature classique française avec le courant et le mouvement réaliste comme Victor Hugo, Gustave Flaubert, Emile Zola et bien entendu le grand poète de tout les temps Charles Baudelaire.

Quand à mon dernier coup de cœur, il y’en a tellement, je suis un grand lecteur et je suis régulièrement l’actualité littéraire. J’ai même créée une page Facebook intitulé « coup de cœur du dimanche » sur laquelle je poste et commente un livre lu la semaine.

Quels conseils donneriez-vous à une personne qui hésiterait à se lancer dans l'édition ?

Il ne faut pas penser à être publié pour devenir célèbre dés les premiers jets en noircissant des pages et des pages. Prenez du plaisir et la liberté d’écrire, n’hésitez pas si vous sentez qu’il y’a matière et quelque chose à dire, à raconter. Cette liberté si magique que ni le paraître, ni la reconnaissance ne doit aliéner. Une fois le goût et l’amour de l’écriture vous semble devenir un métier, vous pouvez y penser à la publication. N’hésitez surtout pas de montrer votre travail aux acteurs du livres.

Votre dernier mot

Quand vous croyez à quelque chose, quand vous faites quelque qui vous semblerez juste et noble ou quand vous avez un rêve que vous voulez atteindre, ne lâchez rien. Travaillez et battez-vous. Le travail et l’effort payent…

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L’écume des affects
Mokrane Maameri L’écume des affects

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