"C'était de l'esclavage", le témoignage d'un sans-papiers algérien en France

"Si on se plaint, on nous vire"

À ses débuts, raconte-t-il, ils étaient deux pour décharger un camion. Avec le temps, une seule personne était missionnée pour cette tâche. Pareil, pour le tri des colis : au départ, ils étaient en tout six personnes puis ils sont passés à seulement trois personnes.

"Une fois, un salarié s’est blessé la jambe en déchargeant un camion. J’ai demandé aux responsables d’appeler une ambulance pour le transporter à l’hôpital. Ils ont refusé et l’ont fait sortir de l’usine. Il n’est jamais revenu travailler et n’a pas pu déclarer un accident du travail.", témoigne le jeune sans-papier algérien, pour faire savoir les conditions dans lesquelles ils travaillent.

Et d'ajouter : "Si on se plaint, on nous vire. Si on refuse de faire des heures supplémentaires, on met un terme à notre contrat. Il arrive aussi qu’on ne nous paye pas nos heures travaillées. Quand on le fait remarquer aux comptables de Derichebourg, sous-traitant de DPD, on nous répond que ce sera fait le mois prochain mais c’est rarement le cas.", a-t-il regretté.

"On n'a pas le choix"

Samir révèle que personne ne critique ces conditions de travail, par peur des représailles. En effet, ils ont dû accepter de travailler 10 heures par jour, "car on n’a pas le choix", a-t-il confié, avant d'ajouter :"On n’a pas de papiers en règle, on a besoin de gagner de l’argent pour régler nos charges."

Il y a quatre mois, ils ont décidé de passer à l'action. Avec environ 70 autres collègues de travail, ils ont décidé de faire grève, avec l’aide de syndicats. "On a installé un piquet à l'intérieur de l’entreprise et devant le site, au niveau de l'entrée du personnel, pour demander de meilleurs conditions de travail ainsi que des justificatifs nous permettant d'être régularisés.", témoigne-t-il.

"On reste soudés"

Après 17 jours d’occupation, le tribunal d'Évry, saisi par l’entreprise, leur a ordonné de quitter les locaux. "On a donc décidé de rester devant la société. Mais début février, la mairie de la ville a demandé l’évacuation des lieux. La police nous a délogés. Dorénavant, on vient tous les jours de 10h à 15h devant les locaux", raconte Samir.

Leur mouvement a abouti à des négociations avec Derichebourg et la préfecture, "mais pour l’instant les discussions piétinent", regrette Samir. "Seules une vingtaine de personnes, sur 70, ont obtenu des garanties de Derichebourg. Mais ce n'est pas suffisant. Nous, on continuera le mouvement tant que tout le monde n’aura pas obtenu satisfaction. On reste soudés.", a fait savoir le jeune algérien.

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